Image : Marianne Mispelaëre, Un Œil sur ta langue (détail), film essai, vidéo numérique, (2022)
Faire Connaissances
Exposition monographique de l’artiste Marianne Mispelaëre au Centre d’art Ygrec-ENSAPC
En collaboration avec Le bureau des heures invisibles
Du 18 septembre au 9 novembre 2024
Le Centre d’art Ygrec sera ouvert pour les journées du patrimoine le 21 et 22 septembre
de 14h à 19h.
Qu’est-ce que cela signifie d’étudier dans une école publique française, aujourd’hui, en tant qu’adolescent·e polyglotte et/ou vivant dans un milieu multiculturel ?
De 2020 à 2022, Marianne Mispelaëre a mené à Marseille une action collective et collaborative grâce au dispositif Nouveaux commanditaires, « Les langues comme objets migrateurs » (méd.- prod. thankyouforcoming). Elle a travaillé avec des enseignant·es en lettres et langues, une didacticienne des langues, et quatorze classes du collège
Vieux Port, du lycée René Caillié et du lycée Victor Hugo. De nombreuses discussions et débats avec des élèves, âgé·es entre 11 et 18 ans, ont permis d’interroger les notions de multilinguisme et de plurilinguisme, l’exil et la transmission, l’histoire, la créolisation, l’interprétation, le concept d’identité à travers le prisme des pratiques langagières des enfants.
L’ensemble de ces recherches, la richesse des discussions et les complexités du contexte de la commande ont mené à la création d’une pièce maitresse, une typographie [1] intitulée la marseillaise (qui sera finalisée par les typographes So-Hyun Bae et Federico Parra Barrios). Cette typographie permet d’écrire en français tout en reflétant les langues des élèves, introduisant ainsi une dimension multiculturelle au sein de l’école. Elle propose d’autre part une expérience de lecture différente, mettant les lecteur·ices dans la situation de cell·eux qui découvrent un système de signes étrangers.
Dans la prolongation de cette typographie, plusieurs œuvres ont été réalisées et sont présentes dans cette exposition : Œuvres protocolaires et processuelles, une vidéo, une installation sonore, des documents officiels traduits et des textes habitent l’espace d’exposition et intègre la longue baie vitrée du Centre d’art pour proposer une adresse directe aux publics d’Aubervilliers.
Pour l’artiste, « cette exposition est un prolongement en termes de réflexion et de partage. Je me suis demandée comment exposer au sein d’une institution artistique des œuvres destinées à des enseignant·es et des élèves. Aussi, comment partager un travail qui a appartenu au vivant et à la relation, et qui par essence ne peut être fixé ? Ici, pour Faire connaissances, ma proposition navigue entre les langues, les codes et les langages. J’ai construit l’exposition avec en tête la commande Nouveaux commanditaires, ses enjeux, ce qui l’a ponctuée artistiquement, relationnellement et politiquement. J’ai aussi pensé à la façon dont ces productions allaient s’inscrire au sein de l’art contemporain et de l’espace du Centre d’art Ygrec, lui-même situé à Aubervilliers et qui présente beaucoup de similarités avec Marseille. Un prolongement donc, qui invite à ce que quelque chose se perpétue : certaines pièces présentées sont à activer sur place, d’autres à emporter ».
Les similarités économiques, sociales et politiques entre Aubervilliers et Marseille sont nombreuses, mais ces deux villes se rejoignent plus spécifiquement sur leurs diversités culturelles et la variété de langues parlées.
Marianne Mispelaëre est née en 1988 en Isère (France), elle vit et travaille à Aubervilliers. Avec pour principal champ d’action le dessin, Marianne Mispelaëre produit et reproduit des gestes simples, précis, éphémères, inspirés de phénomènes actuels et sociétaux. Que se passe-t-il entre nous, en nous, tout au long de l’infinie tâche politique qu’est le côtoiement ? La matière première de MM relève de zones de contact : rencontres, échanges, transmissions, collaborations, emprunts, négociations, affrontements. Elle écoute et observe les relations sociales, le langage – ce qu’il fait sur ses usagers et usagères, ce que cell·eux-ci lui font. Elle étudie ses transformations et sa structure pour repenser ses formes conventionnelles. Je déplace et fait se rencontrer des corps, des langues, des signes, des représentations visuelles (images), façons de dire, de raconter et de penser notre environnement proche ou lointain.
Pour l’artiste, le dessin s’appréhende dans une dimension très large, de l’échelle de la feuille de papier à celle de l’espace mural, jusqu’à l’image photographique, la vidéo et le film, la typographie, le texte, la sculpture, l’installation, l’action performative. Ils sont souvent amenés à être activés, interprétés, privilégiant l’in situ et l’éphémère.
Diplômée de l’ESAL d’Épinal depuis 2009 et de la HEAR de Strasbourg depuis 2012, elle a exposé au Palais de Tokyo (Paris), au NAK (Aix-la-Chapelle, DE), au CEAAC (Strasbourg), au CND – Centre National de la Danse (Pantin), au Carreau du temple (Drawing Now, Paris), à la galerie Salle Principale (Paris). Son travail a été nominé au prix LEAP (Luxembourg, 2018), et au prix AWARE (Paris, 2018). Elle a obtenu le Grand Prix du Salon de Montrouge 2017. Plusieurs de ses œuvres ont intégré des collections publiques en France et Belgique: FRAC Occitanie Montpellier, FRAC Lorraine, FRAC Alsace, Musée d’Art Moderne et Contemporain de Strasbourg, Centre de la gravure et de l’image imprimée, CNAP, FRAC Nouvelle-Aquitaine MÉCA (2020), FRAC Normandie-Rouen. Marianne Mispelaëre a réalisé deux commandes dans le cadre du 1% artistique dans les Vosges, en 2023, et dans le Finistère, en 2020-21.En 2020-22, elle développe avec le dispositif Nouveaux Commanditaires, une recherche collaborative à Marseille : « Les langues comme objets migrateurs ».
https://www.mariannemispelaere.com
Le bureau des heures invisibles (bhi) est un collectif de recherche artistique installé à la Maladrerie à Aubervilliers. Ses activités explorent les processus du “vivre ensemble” et du “faire commun” en les abordant notamment à travers l’expérience de la pluralité des langues. Le bhi s’intéresse aux pratiques hybrides entre arts visuels, écriture, performance et pédagogie et leur place dans la valorisation, la co-production, et le partage des savoirs. L’organisation soutient et développe des projets artistiques et programmes régionaux, nationaux et internationaux en lien avec la pluralité des langues, l’invisibilité sociale et culturelle, et la rencontre.
[1] En isolant les sons du mot « Marseille » et en associant chaque son à un signe des langues des élèves